Les instruments de musique gasconne
Existe-t-il des instruments de musique gascons, ou des instruments jouant de la musique gasconne ? Les deux mon musicien….
Comment définir la musique gasconne ?
Une musique « traditionnelle » qui reproduit et fait évoluer (sens normal de tradition) une pratique musicale, qui si elle est chantée, l’est en occitan de Gascogne et qui a une fonction sociale liée essentiellement à la danse.
On va se placer dans le cadre de la musique « revisitée et redécouverte » dans les années 1970-1980 par celles et ceux qu’on appelle des collecteurs qui parcouraient la Gascogne pour rencontrer des témoins, musicien(ne)s ou non pour raconter, expliquer, jouer, chanter les musiques qu’ils entendaient du début jusqu’au milieu du XXème siècle. Forts de ces témoignages, avec des instruments restaurés ou refabriqués d’après des sculptures, des photos anciennes, des descriptions, ils ont réanimé puis alimenté un répertoire riche. Pour la Gascogne gersoise, le Savès et Samatan sont remarquables à plus d’un titre avec la rediffusion du rondeau (le rond) et une accordéoniste emblématique Léa Saint-Pé de Polastron.
Les percussions
Des instruments connus, comme le tambour (lo tambor) sont issus de la pratique militaire mais adapté dans son jeu : dans les traditions connues (bœuf gras de Bazas par exemple) le tambour s'applique à "coller" au rythme de la mélodie (pas seulement la pulsation).
Des récupérations et transformations d'objets usuels : grelots (sonalhas) divers, coquilles Saint-Jacques frottées l'une contre l'autre, sabots (esclòps) frappés l'un contre l'autre, côtes de bœuf ou lamelles de bois entrechoquées (las trucanetas), tambour à friction fait avec un pot de confit (lo brau o brama-topin)…
Une autre percussion (à corde frappées) sera vue plus loin dans son couple de jeu.
Les instruments à cordes (los instruments de còrdas)
On trouve des instruments joués dans de nombreuses régions et dans de nombreuses esthétiques musicales. Là encore, le style de jeu en fera des instruments "gascons".
Le violon (lo vriolon)
acheté à des colporteurs qui les ramenaient des Vosges, en Gascogne, le violon avait un style de jeu adapté à la danse : double-cordes, bourdons, attaques franches des premiers temps des mélodies de danse… Il arrivait que des fabricants locaux, voire des musiciens, fabriquent eux-mêmes des violons plus "archaïques". On a trouvé des violons fabriqués avec un sabot en guise de caisse de résonnance, voire plus récemment avec des bidons d'huile en métal.
La vielle à roue (la sansonha)
une roue, entrainée par une manivelle tournée à la main droite, frotte sur les cordes. Un clavier à la main gauche permet de faire les notes mélodiques, une corde assure le rythme et d'autres cordes les bourdons. Là encore, souvent achetées à des colporteurs les ramenant d'Auvergne, elles deviennent des instruments gascons au style de jeu adapté à la danse (accentuations adaptées).
Les instruments à vent (los instruments de vent)
Il existe de nombreux instruments à vents dans la musique gasconne. Des instruments spécifiques "indigènes" ou des instruments soit universels, soit plus connus et "adoptés" par les musiciens (je pense aux clarinettes, cornets à pistons par exemple qui auront beaucoup joué les danses gasconnes entre les deux guerres).
Les flûtes (las flabutas)
La flûte traversière est sans "bec ou sifflet" fabriqué, on le forme avec sa bouche sur le bord du trou comme dans le fifre (lo pifre) qui est un tube de roseau ou de sureau percé au fer rouge ou fabriqué dans du bois de fruitier, voire d'ébène avec des outils spécifiques. Les fifres en ébène peuvent être des fifres militaires avec bague en argent et clé. Souvent, pour la musique de rue, le fifre est associé au tambour. Dans le Bazadais, cet ensemble s'appelle une ripataulèra avec une grosse caisse en plus.
Il existe des flûtes "à bec" avec un nombre de trous variable. Une des plus "emblématique" est la flûte à 3 trous (flabuta). Deux trous sur le dessus, un pour le pouce au-dessous, souvent fabriquée en buis (bois européen très dense), elle se joue à une main. Le musicien pouvait jouer de deux flûtes en même temps (une à chaque main), mais la plupart du temps, il jouait du tambourin à cordes (tamborin) en même temps : caisse de résonnance avec 6 cordes ou plus sur le dessus. Elles sont frappées en même temps grâce au pimbó en produisant à la fois un accord continu type bourdon et une stridulation rythmique. Ce couple existe des deux côtés des Pyrénées : au Pays basque : xirula et ttun-ttun, en Aragon : Chiflo et salterio ou chicotén, en Provence, mais également en Angleterre.
Les hautbois
Différents hautbois existent. Il s'agit d'un tube mélodique percé avec un pavillon à l'extrémité pour "projeter" le son produit par une anche double (caramèla) faite de deux languettes minces de roseau attachées l'une sur l'autre.
En Gascogne, nous en avons principalement deux : en Couserans (Ariège), l'aboés ; en Bigorre, on trouve le clarin, plus petit.
Les cornemuses
La famille des cornemuses est très présente sur le territoire occitan. Pour que l’on parle de cornemuse, il faut une réserve d’air et au moins un bourdon qui produise un son continu. Avec 7 cornemuses différentes, l’Occitanie est la région d’Europe la plus riche en termes de variété de cornemuses. Elles ont des noms occitans (la bodega ou la craba, la cabreta, la chabreta… qui font référence à la chèvre dont la peau constituait la réserve d’air).
Pour la zone gasconne, il y a trois cornemuses : le Bot en Val d’Aran, la samponha (cornemuse polyphonique des Pyrénées) et la Boha (cornemuse des Landes de Gascogne, appelée ainsi car c’était son aire « historique » de jeu). Son sac est fait de cuir, historiquement de chèvre ou d’agneau, aujourd’hui parfois de matériaux synthétiques. Le porte-vent (lo bohet) et la pièce de jeu (lo pihet) sont fabriqués majoritairement en buis. Les anches (las espiulas) qui produisent le son étaient en roseau, aujourd’hui elles sont en matériaux plastiques et en fibre de carbone. Leur principe (anche simple) et le fait que le tuyau mélodique ainsi que le tuyau d’accompagnement (plus qu’un bourdon car on peut obtenir deux notes) soient dans la même pièce de jeu font de la boha une cornemuse à part dans les cornemuses françaises, la rapprochant de cornemuses slovaques. Ses différentes dénominations font référence au souffle (boha, boha au sac), à l’outre (bohica), à la chèvre (chabreta)… Instrument « traditionnel » dont le dernier joueur avait disparu en 1957 (Jeanty Benquet), cet instrument connaît actuellement une vivacité et une actualité musicale peu commune : groupes, solistes, enseignement en Conservatoire… facture instrumentale innovante… La boha est un instrument primordial pour la danse.
L'accordéon
instrument dont le brevet d'invention a été déposé le 11 mai 1829 à 17 h 30 sous le nom de l'invention, "accordion", par Cyrill Demian, facteur de piano et orgues à Vienne en Autriche. Très vite, cet instrument de salon se popularise et apparaît dans toutes les musiques populaires d'Europe. On distinguera, là également, des styles de jeu que l'on pourrait qualifier de "régional".
Intéressons-nous à l'accordéon diatonique (l'acordeon diatonic, lo zinzon, lo diableton en Lengadòc). Des lamelles métalliques (anches) de différentes longueurs produisent les notes lorsque les doigts ouvrent les soupapes à l'aide des touches et que l'air fait vibrer ces anches.
La mélodie (et des accords) sont produits par la main droite quand la main gauche assure un accompagnement rythmique et harmonique grâce aux basses (même principe d'anches mais plus graves). Une spécificité de l'accordéon diatonique est qu'il est dit "bi sonore" : avec la même touche, on ne produit pas la même note selon que l'on ouvre ou que l'on ferme le soufflet. Ce dernier, en carton et cuir recouvert de tissu, assure la production d'air. Des bretelles permettent de porter et tenir l'instrument.
Instrument "moderne", fabriqué industriellement, il a rapidement côtoyé puis remplacé les instruments présentés précédemment. Du début du XXème siècle jusque dans les années 1960 par son cousin plus gros, l'accordéon chromatique, l'accordéon a été le roi des bals. Acheté par correspondance sur des catalogues tels que Manufrance ou Le Chasseur Français, arrivant de Tulle en Corrèze, d'Italie ou d'Allemagne, chaque village avait son ou ses accordéonistes. Parfois les enfants (voire les adultes) utilisaient une version "plus simple" à bouche : l'harmonica (lo virabèl).
Frise chronologique
Questions
- Existe-t-il des instruments de musique typiquement gascons ou des instruments jouant de la musique gasconne ?
- Quelles familles d'instruments sont présentes dans la musique gasconne ?
- Quelle était l’une des fonctions importantes de la musique gasconne ?