De tous temps la Gascogne, comme toutes les autres régions d’ailleurs, a été une terre d’émigration et d’immigration. Même si César décrivait l’Aquitaine comme une entité à part dans la Gaule, une espèce de « Far West » de la romanité, la Gascogne n’est pas un « cul-de-sac » entre l’Océan Atlantique, les Pyrénées et la Garonne.

Suivons ...

la Ténarèze, cette route de transhumance connue depuis le néolithique qui permet aux troupeaux et aux bergers de relier les Pyrénées aux Landes girondines sans franchir de cours d’eau. Empruntons les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle (Santiago de Compostela) qui permettent aux pèlerins piétons de relier l'Europe du nord à la Galice espagnole.

Regardons ...

les filières qui permettaient de passer en Espagne pendant la Seconde Guerre mondiale pour échapper à la barbarie nazie et aux vichystes et éventuellement rejoindre la Résistance. 

Roulons ...

de nos jours sur les routes qui voient les estivants se déplacer vers l’Océan ou les skieurs vers les Pyrénées, Pyrénées qui jusqu’à une période récente (milieu du XXème siècle) étaient un passage entre voisins du nord et du sud plus qu’une frontière fermée.

La Gascogne a également été une terre d’émigration.

Orsalhèrs

Sans ordre chronologique, parlons des « Orsalhèrs », ces Ariégeois qui jusqu’à la Première Guerre mondiale capturaient des oursons orphelins, leur apprenaient le « métier » et en faisaient leurs compagnons de spectacle et de voyage dans la France, l’Europe voire le Monde, encore parfois qualifié de Nouveau quand on parlait des Amériques. Par la suite, la demande était telle qu'ils bénéficieront de "filières russes" de fournisseurs d'oursons.

Cadets de Gascogne

Parlons de ceux que l’on nomme les « Cadets de Gascogne » qui, faute d’autre avenir ou de possibilité de mariage, devenaient des militaires réputés au service des puissants qui les payaient : lors de la guerre de Cent Ans ils furent tantôt du côté des Anglais, tantôt du côté des Français, mais toujours Gascons.

Mousquetaires des rois de France

Parlons encore des Mousquetaires des rois de France dont la légende romancée est plus flatteuse que la triste vie de mercenaires ; ou de ces autres gascons « du peuple » devenus Généraux ou Maréchaux de Napoléon 1er, voire Roi de Suède comme le palois Bernadotte.

aventuriers du quotidien

D’autres « aventuriers du quotidien » ont traversé l’Atlantique pour chercher une vie meilleure vers des espaces américains du nord ou du sud à conquérir et parfois faire fructifier ou développer les métiers de l’hôtellerie et de la restauration à New-York par exemple au début du XXème siècle. Certains « revenaient au pays » fortune faite.

La perte de population aura plusieurs raisons : la crise du phylloxéra qui ravage les vignes, très présentes, au début du XXème siècle, la Première Guerre mondiale qui tarît la tranche des jeunes hommes entre 18 et 30 ans. L’arrivée de main d’œuvre « étrangère » permettra le maintien de l’activité économique : familles italiennes dans le Gers par exemple pour le travail agricole, familles polonaises pour construire les barrages pyrénéens, familles espagnoles venues pour raisons économiques puis politiques après la « Guerra Civil » de 1936, populations fuyant la guerre dans le Nord de la France en 1940, familles portugaises, maghrébines pour apporter un renfort de main d’œuvre et enfin une immigration « plus aisée » de familles venant s’installer en Gascogne pour profiter de sa douceur de vivre ou encore l’installation de familles fuyant les persécutions ou les misères d’autres parties du Monde.

Les restructurations du modèle paysan après les années 1970 qui font passer l’agriculture d’une polyculture vivrière faisant vivre ou survivre de nombreuses familles à une polyproduction intensive nécessitant moins de main d’œuvre ont conduit à un exode rural massif : déplacement vers les centres urbains (Toulouse, Bordeaux, Tarbes) et leurs bassins industriels (aéronautique, armement...) en laissant de grands territoires se dépeupler avec une population vieillissante. 

On assiste à une métropolisation autour des grandes villes qu’il faudrait contrebalancer en maintenant des services publics, des moyens de transports, des modes de vies et de production qui permettraient à toute la population de profiter de ces espaces.

Pour finir sur un clin d'œil, notons que la route qu'empruntent les tronçons de l'Airbus A380, fleuron de la modernité et de l’industrie aéronautique européenne pour rejoindre Bordeaux à Toulouse est la route qu'utilisaient déjà les romains il y a deux millénaires, bien avant les autoroutes.

Les films "L'orsalhèr" de Jean Fléchet ; Farrebique et Biquefarre de Georges Rouquier.

L'article : Depuis Ercé, les Bénazet ont conquis l'Amérique